Opération clémentine

Le suspense n'a que trop duré et il est temps de révéler aux lecteurs de ce blog l'évènement du mois qui fait passer le mariage rocambolesque de Sarkozy et Carla Bruni pour une vulgaire histoire secondaire destinée aux femmes au foyer attardées. Plus délurée que les frasques de Britney Spears, plus fort que le dernier Rambo, plus romantique que Love actually et la vie est belle réunis, l'opération clémentine, malgré son fiasco total, restera à coup sur dans les annales.

Bobolze, Don Quichotte des temps modernes, veut reconquérir sa belle dulcinée Morgane (la comparaison s'arrête là car je me sens pas trop dans le rôle de Sancho Panza). Son imagination débordante va imaginer un plan magnifique d'amour et de naïveté.
Bonne pâte, je décide de l'aider car je ne peux me résoudre à laisser dans l'abondon et l'incertitude un coeur blessé qui souffre et ne demande qu'à prouver qu'il aime ardemment.

Nous voilà donc partis un beau matin à 7 dans le froid et le vent, la peur au ventre, pédalant fièrement sur nos fiers destriers de la mairie de Paris, avec pour but de rejoindre le château de la belle au bois dormant près de Denfert Rochereau. Il fallait à tout prix coller un énorme panneau sur lequel on pouvait lire: "bonjiourno mi amor (et oui Don Quichotte a des penchants italiens...), rends-toi à la boulangerie au coin de la rue pour avoir une surprise", avant que la belle ne sorte de chez elle pour se rendre à son labo. Première frayeur: partis un peu en retard le matin, il a fallu pédaler sec pour arriver dans les temps (trajet en moins de 25 min) et le collage du panneau s'est fait en quatrième vitesse.

Je devais ensuite attendre devant la boulangerie au cas où Morgane serait un peu distraite et pour pouvoir prévenir Bobolze une fois la première phase terminée. Pas de bol pour moi, elle décide ce matin de partir 45 min plus tard que d'habitude (quand je parlais de la belle au bois dormant...) et me voilà donc comme un gland à attendre devant une agence immobilière au coin de la rue avec la gérante qui vient me voir pour savoir ce qui ne va pas chez moi.

Epuisé de fatigue dans un froid polaire qui glace les os, je dois pourtant maintenir mon attention au maximum. Enfin la belle paraît mais zappe l'étape boulangerie. Je suis donc obligé d'enlever ma cagoule (c'est peut-être pour ça que la fille de l'agence immobilère se posait des questions) et de l'inciter à revenir sur ses pas. Elle passe donc finalement à la boulangerie où on lui remet avec un beau sourire deux chocolatines (si c'est pas mignon...) plus un petit sondage: quel est ton fruit préféré? clémentine, banane, mandarine (c'est vrai qu'il ya beaucoup de différences entre une clémentine et une mandarine mais passons....) qu'elle devait déposer au métro Alésia

Pendant ce temps, je fonce à toute vitesse au point suivant où on avait établi un contact avec un militant de Delanoë (c'est pour vous dire à quel point cet homme est fou amoureux...) qui distribuait des tracts à l'entrée du métro. Notre complice devait récupérer le sondage de la belle.
Manque de bol, au moment où elle arrive, il discute tranquillement avec des gens dans un bar en face. Morgane et mon gugus sont à moins de deux mètres l'un de l'autre mais ne se voient pas.
Le suspense est intenable....
Décidé à prendre tous les risque pour sauver l'opération du naufrage, je tente une sortie de ma cachette derrière le kiosque à journaux et je commence à faire de grands signes pour attirer l'attention du "Delanoë boy". Mais cet andouille ne me voit pas et si finalement Morgane qui me repère et se dirige vers moi.

Ici le narrateur préfère laisser modestement la place à la spontanéité du dialogue pour restranscrire au mieux l'intensité dramatique des évènements.

Extrait:
elle: "Qu'est ce que je dois faire maitenant"
moi: "il faut que tu ailles voir l'homme en rouge pour lui donner le sondage"
elle "mais de toute façon tu vas le récupérer après"
moi (ton désespére): "oui mais essaie quand même de jouer le jeu et de faire semblant"
elle se dirige vers notre acolyte, lui remet le précieux sondage après qu'il ait mis quelques minutes à se souvenir (c'est décidé je vote pour Panafieu) et revient vers moi.
elle: "je fais quoi maintenant?"
moi (proche du suicide): "fais comme d'habitude"

Je récupère le sondage à demi désabusé et j'appelle Bobolze pour lui dire que notre plan est en train de s'écrouler. Plus motivé que jamais, il m'explique qu'il va tout rattraper sur la fin (le naïf...) et je lui précise qu'elle a répondu clémentine pour le fruit préféré.

Notre chevalier au grand coeur était à la station de métro où la belle devait sortir. Après avoir affiché des panneaux pour indiquer un point de rendez-vous, il coure acheter des clémentines mais à son retour constate avec amertume que les pannezaux ont été enlevés. Pas le temps de tergiverser, Morgane sort du métro. Bobolze tente désespérement de trouver un passant qui acceptarait de donner le précieux fruit défendu symbole de son amour. Comme personne n'accepte, il est obligé d'arrêter sa bien-aimée en plein rue.

Comme, il m'est impossible de décrire avec des mots la profondeur des sentiments révélée au court de ce bref échange entre nos deux amouraux, je me contenterai d'être factuel. Il lui donna ses clémentines et un ballon de volley avec des signes de son amour, puis reparti sa crête de coq au vent vers son palace à Bastille où je l'attendais impatient de connaître le dénouement final.

Oui, cette opération était un fiasco, mais la belle Morgane a été touchée par ce magnifique geste d'amour. Si j'ai choisi de vous faire partager cette aventure, c'est pour vous monter que notre Bobolze est un grand romantique, un être sujet aux plus folles passions, un coeur sensible, un brasier ardent, un volcan de tendresse et d'affection. Cette article est avant tout un hommage à ce côté trop souvent oublié de sa personnalité.
Alors encore milles mercis pour ce grand moment d'émotion qui m'aura tiré les larmes.

PS: je lui ai proposé d'écrire un poème la prochaine fois mais il m'a dit: "là quand même faut pas déconner". Le romantisme aura-t-il le dessus un jour? Suite au prochain épisode.